Le scarabée pique-prune bloque l'autoroute A-28

Le ministre va revoir le tracé de l'A 28 !
Le Maine Libre - 16 août 1999

 
Jean-Claude Gayssot, qui a pris connaissance du rapport du Pr Luce, sur la survie du pique-prune, se dit prêt à revoir le tracé de l’autoroute au sud du Mans. L’espoir renaît chez les Verts...
Le "pique-prune" plus fort que les bulldozers ! Les choses n’ont pas traîné. A peine bouclé, le rapport du professeur Luce, entomologiste au Muséum d’histoire naturelle, sur les conséquences de la construction de l’autoroute A 28 auprès des espèces de coléoptères protégées, a atteint sa cible : le ministère de l’Equipement et des Transports. Et le moins que l’on puisse écrire, c’est que Jean-Claude Gayssot n’a pas été sourd aux conclusions du spécialiste français du scarabée, pour qui « l’Osmoderma eremita » ne survivrait pas au passage de l’autoroute en lisière de la forêt de Bercé. Là où justement la petite bête a élu domicile et vit en (petite) colonie dans de vieux châtaigniers.
Depuis sa résidence d’été, à Béziers, et entre deux corridas, le ministre Gayssot s’est dit, samedi, « prêt à revoir le tracé de l’A 28 si c’est le moyen approprié pour respecter les textes européens ». Avant de préciser à notre confrère du Journal du Dimanche daté d’hier, qu’il prendra « à ce sujet une décision à la rentrée, j’espère en septembre ».
Le ministre des transports peut donc décréter l’abandon du chantier. Et si la décision n’est pas facile à prendre, vu l’avancement des travaux, Jean-Claude Gayssot n’a plus vraiment le choix. Si l’Etat français décidait de poursuivre la construction de l’autoroute au sud du Mans, au mépris du rapport Luce, il se mettrait aussitôt en infraction avec la réglementation européenne et sa propre loi. En effet le pique-prune, dont il ne reste que quelques spécimens en Suède, en Grèce et donc en... Sarthe, est ultra-protégé par la Convention internationale de Berne, la directive européenne habitat de juin 1992 et un décret français de juillet 1993.
« Les directives européennes sur les habitats prioritaires sont claires : on ne peut y toucher ! » relève le militant des Verts sarthois, Christophe Beurois, pas mécontent de voir le ministre « intégrer les données du rapport Luce ».
Intérêt majeur
« Cette intégration des contraintes de l’environnement dans la définition des grands projets routiers, et la volonté affichée d’appliquer la réglementation européenne en vigueur, laissent augurer une réelle prise en compte de la notion de développement durable » renchérissent ses collègues Verts des Pays de la Loire en écho aux déclarations de Jean-Claude Gayssot.
Pour autant, le ministre n’a pas encore complètement abandonné l’idée d’une autoroute reliant Le Mans à Tours. Dans les colonnes du « JDD » d’hier, il explique ainsi que « cette portion d’autoroute au sud du Mans est indispensable, avant de préciser mais nous devons nous soumettre aux règlements en vigueur ».
Dès lors, peut-on imaginer que l’A 28 poursuive sa route vers Tours, mais en évitant Bercé et l’habitat du célèbre pique-prune ? Personne n’ose croire (et surtout pas les écologistes) à la définition d’un nouveau tracé...
Pour espérer conduire à son terme l’autoroute, l’Etat devrait donc faire la preuve qu’il n’y a pas d’autre alternative possible, et que ce projet est d’un intérêt public et économique majeur. Or dès hier midi, sur l’antenne d’Europe 1, le professeur Jean-Marie Luce, lui aussi satisfait des premiers commentaires du ministre, a rappelé combien le scarabée pique-prune, et sa survie dans le massif forestier sarthois, constituait « un intérêt public et économique majeur, encore plus important que la construction d’une autoroute ! »
Menace
L’autre alternative possible, ce sont les militants écologistes qui l’avancent. Et la répètent inlassablement depuis 1996. Plutôt que la saignée de bitume, dévastatrice en pleine nature, les Verts préconisent le réaménagement de la nationale 138. Une solution d’autant plus raisonnable selon eux, que « l’on sait aujourd’hui que cette partie d’autoroute au sud d’Ecommoy serait déficitaire, avec un trafic estimé de 5000 véhicules/jour. » « Or il en faudrait 14 000 pour rentabiliser l’ouvrage ! » assure Christophe Beurois.
L’avantage du réaménagement de la nationale 138, c’est qu’il éviterait des remembrements et la coupure du site naturel auxquels de nombreuses espèces d’invertébrés (dont le pique-prune) sont particulièrement sensibles, selon les termes du rapport de l’entomologiste.
Et puis, les Verts s’en tiennent à la loi. « Nul ne peut s’affranchir du droit communautaire » menacent les « écolos », en mettant sur la table la manne des fonds structurels européens...
Patrick PLANCHENAULT
 

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